Recherche participative

S’engager dans une recherche participative employant des méthodes visuelles avec des personnes touchées par les inégalités sociales, la précarité ou la pauvreté, l'exclusion sociale ou la faible littératie signifie, c'est d’une part que,
  • vous êtes disposé à leur céder un certain pouvoir décisionnel à l’intérieur de votre étude (étendue du pouvoir à déterminer au début de l’étude) et,
  • vous désirez que les participants montrent leur expérience plutôt que la racontent à travers des entrevues, groupes de discussion ou sondages.
La notion de participation (pouvoir délégué aux participants) peut varier d’une étude à l’autre, mais nous estimons que pour qu’une étude soit dite participative, elle doit favoriser l’implication des participants à toutes ses étapes.

Évidemment, plus ces derniers auront l’opportunité d’influencer sa direction et le traitement des données et des résultats, plus l’étiquette participative trouvera son sens.

La recherche avec des méthodes visuelles peut être définie comme étant l’utilisation par les chercheurs d’outils d’enquête sous forme de matériel visuel représentant quatre types de données: 

Données pré-existantes (« found data »)

Visuels existant avant le projet de recherche et n’ayant donc pas été créés à l’intérieur de celui-ci, par exemple, des photos de famille d’une personne peu scolarisée qui serviraient de point de départ pour produire d’autres données (ex. : photo-entrevue sur le soutien reçu de la famille dans la recherche d’informations sur la santé sur Internet).

Données créées par les chercheurs

Visuels créés par le chercheur, par exemple, une vidéo pour observer la relation entre un patient analphabète et son médecin.

Données créées par les participants

Visuels créés par les participants, par exemple, une narration numérique (digital storytelling) relatant le parcours dans le système de santé d’une personne issue de l’immigration récente depuis son arrivée au pays.

Représentations visuelles

Visuels représentant les résultats de l’étude. Par exemple, selon la posture épistémologique du chercheur, un/des visuels accompagnés d’un texte explicatif (ex. : photos avec vignettes) viendront rendre compte d’une « vérité » (posture postpositiviste - réalisme); des visuels auxquels aucune signification ou explication n’auront été accolées laisseront place à la libre interprétation du public (posture interprétative).
Les méthodes visuelles participatives sont une méthodologie de recherche novatrice émergente qui a déjà atteint une maturité scientifique. Ces méthodes donnent l'opportunité aux participants d’influer les décisions qui touchent leurs expériences vécues et leurs réalités parce qu’ils acquièrent le pouvoir d’affirmer leurs idées et faire le plaidoyer en s’engageant activement dans l’autoreprésentation, et par-là faire un équilibrage de pouvoir au niveau local.

Apport des méthodes visuelles

Plusieurs avantages sont attribués à l’utilisation de méthodes visuelles en recherche. Ces avantages sont particulièrement apparents dans la recherche impliquant des personnes touchées par les inégalités sociales, la précarité ou la pauvreté, l'exclusion sociale ou la faible littératie. En voici quelques-uns :

  1. Favorise l’implication des participants même lorsque les concepts sont complexes;
  2. Aide à communiquer et à réfléchir sur des sujets délicats ou pour lesquels les mots sont difficiles à trouver;
  3. Capte des aspects de la vie de tous les jours des participants qui ne seraient pas aussi efficacement dévoilés par d’autres méthodes de recherche exigeant un bon niveau de littératie (ex. : questionnaire) ou qui peuvent être perçues comme impersonnelles (ex. : sondage) ou intimidantes (ex. : entrevue);
  4. Facilite la re-création d’événements ou de perceptions sensorielles et émotionnelles ;
  5. Offre la possibilité aux participants de montrer comment ils se sentent dans l’expérience qu’ils vivent ;
  6. Donne le pouvoir de la collecte des données et de la restitution des résultats directement aux participants («empowerment»);
  7. Favorise la réflexion des participants sur leur expérience, les aides à communiquer cette expérience et à construire leur propre narratif;
  8. Permets aux participants de développer/renforcer la conviction qu’ils sont compétents pour communiquer leur expérience;
  9. Crée des liens et aide au dialogue entre participants et chercheurs;
  10. Amène à une compréhension partagée entre participants et chercheurs;
  11. Génère des résultats dans lesquels se reconnaissent les participants;
  12. Permets aux participants de s’approprier les résultats et les responsabilise vis-à-vis les conclusions de la recherche;
  13. Au lieu de se sentir comme des objets analysés ou desquels on tire des données, les participants deviennent actifs et co-créateurs de connaissances;
  14. Permets aux participants de faire valoir des positions (« advocate ») pouvant bénéficier aux autres personnes touchées par les inégalités sociales, la précarité ou la pauvreté, l'exclusion sociale ou la faible littératie.
  15. Permets d’accroitre l’autonomisation et l’estime de soi des participants, en particulier ceux avec un faible niveau de littératie et souvent exclus dans la recherche.